Lancement du Ciné-club AMDA !

L’AMDA en collaboration avec le cinéma Cinélux à Genève inaugure un ciné-club dédié à la science-fiction ! Au menu, des films originaux, (d)étonnants, des pépites peu connues ou simplement un coup de cœur à partager. Le cycle commence ce mercredi 24 septembre par un voyage dans le temps avec la projection du film espagnol Timecrimes (Los cronocrimenes) du réalisateur Nacho Vigalondo, sorti en 2007.

Projection du film à 21h !

L’artiste de la carte de membre 2025 : Sandrine Pilloud

Pour la carte 2025, le nom de Sandrine Pilloud nous a été soufflé par Lionel Tardy, avec la découverte de son livre Terres Sauvages dont elle a réalisé la couverture et les illustrations. Le trait de cette Lausannoise se démarque par son style original, coloré et rempli de vie. Un trait que l’on constate aussi dans l’illustration conçue pour la carte, mêlant paysage suisse traditionnel bucolique et décalage SF. Rencontre avec l’artiste.

Quel est votre parcours artistique ?

J’ai débuté à l’âge de 8 ans, en prenant des cours de peinture et dessin chez une artiste peintre. Après la scolarité obligatoire, il m’était assez clair que je voulais suivre une voie dans le visuel. Je me suis inscrite à l’ERACOM à Lausanne en tant que Conceptrice en Multimédia (aujourd’hui Interactive media designer). Je suis ensuite partie à Los Angeles, afin d’approfondir le dessin axé spécifiquement pour le jeu vidéo et les films dans diverses écoles (Gnomon, Concept Design Academy, Red Engine), sélectionnant les cours qui m’intéressaient le plus. Là, je suis revenue sur les fondamentaux du dessin (observation, perspective, gestion de la lumière, des couleurs, etc.) mais j’ai aussi beaucoup appris sur les techniques numériques et le design d’objet, d’environnement, de personnages, de créatures, propres à l’industrie du divertissement. Cette période de ma vie fait partie des piliers qui me définissent aujourd’hui professionnellement, tant la qualité des cours était bonne et proche du monde réel de la production.

De retour en Suisse, j’ai travaillé sur des projets de jeux vidéo notamment pour Sunnyside Games, ou sur le jeu vidéo Colorful Darkness pour lequel j’étais directrice artistique. Mon emploi du temps actuel se partage entre une partie à mon compte en tant qu’illustratrice, et une partie en entreprise où je suis graphiste et illustratrice !

Une préférence entre ces différents domaines d’expression artistique ?

Je dirais que mon intérêt initial et principal était plutôt axé jeux vidéo, mais que je me suis adaptée aux demandes qui me sont parvenues professionnellement, d’où davantage d’édition et de mandats illustratifs. Ce qui n’est pas pour autant moins passionnant ! J’ai plaisir à travailler dans ce milieu et je suis heureuse d’avoir suffisamment de demandes pour pratiquer mon métier. Si à l’avenir j’avais plus de projets de jeux vidéo, j’en serais malgré tout ravie.

Vous avez un style assez personnel, riche en couleurs, jouant sur le flou et les détails à la fois. Quelles ont pu être vos sources d’inspiration ?

Je pense avoir un intérêt particulier pour la réalisation d’images qui transportent le spectateur (moi y compris) dans une ambiance, dans des univers qui font ressentir des émotions, et ceci passe en bonne partie par les couleurs et la gestion des ombres et des lumières. Ce sont des aspects que j’aime beaucoup travailler et prendre le temps d’approfondir.

J’ai aussi toujours été attirée par les œuvres des anciens maîtres de la peinture à l’huile. Ils me fascinent, ils ont l’art de maîtriser ce qui doit être net et de capter l’œil, de laisser les zones sur lesquelles l’œil doit juste se balader sans s’y arrêter, afin de créer une image équilibrée, agréable à regarder et pleine de ressenti. Je ne prétends pas y arriver à la perfection, mais ce sont des valeurs qui m’inspirent et que je garde toujours en tête lorsque je réalise un visuel.

Vos travaux, notamment en jeux vidéos, concernent des univers de science-fiction. Ailleurs, on découvre aussi une attirance pour la fantasy. Illustrer l’imaginaire était une évidence pour vous ?

Je ne sais pas si c’est quelque chose qui a toujours été présent chez moi ou si cela m’a été révélé durant ma jeunesse en jouant à Zelda, à Final Fantasy ou en regardant les films du studio Ghibli, mais le résultat est que ces univers m’ont toujours beaucoup fascinée et que j’ai très vite eu envie de les mettre en image. Je pense qu’il y a également un lien au voyage et à la découverte du monde, d’autres civilisations qui me touchent et me donnent envie d’illustrer ce qui n’est pas de chez nous. Cerise sur le gâteau, utiliser la créativité pour créer quelque chose qui n’existe vraiment pas, où tout (ou presque) est possible !

Carte de membre AMDA 2025

Qu’est-ce qui vous a inspiré pour la carte de l’AMDA 2025 ?

D’une manière générale, je préfère illustrer les environnements que les personnages. A côté de ma passion pour le dessin, je fais beaucoup de montagne et j’ai donc l’occasion d’admirer de magnifiques paysages et une nature que j’ai très souvent envie d’interpréter en image. Et j’aime apporter un petit twist à ces images plus traditionnelles, afin qu’elles racontent une histoire.

Un souvenir de la Maison d’Ailleurs ?

Mon lien avec la Maison d’ailleurs est en fait très important et a été révélateur pour le choix de ma carrière. Je me souviens être allée voir l’exposition de Christian Scheurer, avec entre autres ses réalisations pour Final Fantasy 9, et avoir pris conscience qu’il était possible de faire de cette passion un peu hors norme son métier ! Je suis repartie avec deux magnifiques posters et j’ai entamé mes recherches pour pouvoir suivre cette voie moi aussi.

Quelques mots sur vos projets à venir ?

Depuis plusieurs années, j’illustre les livres de Lionel Tardy pour les aventures de Kanako Sawada, une jeune recrue qui évolue dans un Japon post-cataclysmique. Nous sommes en train de travailler sur une suite au premier tome qui est sorti l’année passée [en 2023, ndlr]. En ce moment, je garde exceptionnellement un peu de temps pour des projets personnels qui me tiennent à cœur et qui passent souvent en second plan.

–> Site internet de Sandrine Pilloud : www.barbo.ch

Vincent Gerber
Publié dans D’Ailleurs Infos, N°38, 2025.

Multiversalités

Il y a une nouvelle venue dans le paysage de la SF francophone. L’éditeur français « L’œil d’or » a lancé en automne 2023 une revue dans sa collection « Angle Mort ». Et comme il est le mieux placé pour en parler1, voici ce qu’il faut savoir :

« La revue Angle Mort a pour ambition de réunir deux fois par an des écrivains, des artistes et des scientifiques issus de diverses disciplines, dont la spécificité est de mobiliser la science-fiction comme une forme pratique d’enquête sur soi ou sur le monde qui nous environne. »

Le premier numéro de cette revue2, sous-titré « Récits, analyses et critiques de science et de science-fiction », est consacré au thème des multiversalités. On y trouvera des nouvelles (dont des inédites, en français, de Philip K. Dick et Larry Niven : si, si, c’est possible !) et des essais, dont « Le multivers est-il le lieu ou l’originalité va mourir ? » de Stephanie Burt.

Pour les curieux, voici quelques extraits tirés du texte introductif de la revue, « La science-fiction n’est pas une littérature comme les autres », de Julien Wacquez, directeur de la collection :

Sur la question de la définition (impossible) de la SF :

« … c’est dans l’impureté d’un texte que résident son caractère et sa qualité de science-fiction – dans le doute qu’il instille sur sa forme, les codes d’écriture et de lecture qu’il brise ou qu’il déplace, les emprunts et les mélanges qu’il opère. » (p. 20)

« Pourquoi la catégorie de science-fiction a-t-elle connu le succès qu’elle a connu ? Pourquoi est-ce précisément celle-ci que nous avons collectivement choisie et pas une autre ? C’est parce qu’elle permet aux écrivaines et aux écrivains qui, d’un côté, cherchent la rigueur scientifique de ne pas abandonner toute ambition littéraire et, d’un autre côté, à celles et ceux qui cherchent un style et une sensibilité littéraire de ne pas abandonner la science. » (p. 21)

À propos du thème de cette première revue Multiversalités :

« L’idée de multivers semble relativement simple. Et parce que les scientifiques s’y intéressent sérieusement, on pourrait s’attendre à ce que leur travail apporte des précisions, des éclaircissements supplémentaires sur ce dont il s’agit – et c’est bien le cas. Mais à y regarder de plus près, on se rend vite compte qu’il existe, même chez les scientifiques, une très grande gamme de multivers différents, qui ne se recoupent pas nécessairement les uns les autres. Il y a de la multiplicité dans le multiple lui-même, de la diversité dans les manières de multiversaliser – d’où le choix qui a été fait pour le titre de ce livre, Multiversalités. » (p. 25)

« C’est ce qu’on appelle un objet controversé : il y a des gens pour défendre l’idée selon laquelle le multivers existe réellement et d’autres qui, au contraire, remettent en cause la scientificité même de cette idée. » (p. 27)

« Ce livre adopte donc une autre démarche : il essaie de comprendre, à travers des exemples, en quoi les récits de science-fiction, allant là où les scientifiques ne peuvent se rendre (mais là où ils tendent néanmoins), éclaircissent les enjeux de leur travail. Il essaie de montrer l’existence d’une communauté de pensée et de spéculation sur le thème du multivers – une communauté silencieuse, unie par les textes – composée d’écrivains et d’écrivaines de science-fiction, de scientifiques, philosophes et anthropologues, qui explore ses conséquences épistémologiques ou métaphysiques. » (p. 30)

J’espère que ces quelques extraits vous auront donné envie, comme à moi, d’en découvrir davantage.

Souhaitons plein succès à cette revue qui montre qu’il est possible, encore (enfin ?) aujourd’hui, d’avoir de l’ambition dans le monde de la SF !

1 Présentation de la revue sur le site de l’éditeur : Angle Mort, éd. L’œil d’Or (loeildorenligne.com)

2 Multiversalités, éd. L’œil d’or, 2024.

L’Observatoire de l’imaginaire

Vous ne le connaissez sans doute pas, et pourtant il vous scrute et cherche à vous comprendre. Lui, ce n’est pas Big Brother, mais bien l’Observatoire de l’imaginaire, un groupe informel institué pour donner suite aux États généraux de l’imaginaire qui se sont tenus aux Utopiales de Nantes en 2017. Son but : répondre à un certain nombre d’interrogations, de préjugés parfois, à travers une compilation des données statistiques du milieu. Autrement dit, poser un regard (objectif et référencé) sur la réalité éditoriale et économique de cet « écosystème » des littératures de l’imaginaire (autant science-fiction que le fantastique et la fantasy), avec en arrière-fond l’espoir d’apporter des clés capables d’aider à leur promotion.

Depuis 5 ans, l’Observatoire délivre un rapport annuel sur le nombre de titres publiés (nouveautés & rééditions), les chiffres des ventes, les répartitions de genre en son sein ou encore la place dans les médias. Composé aujourd’hui d’une douzaine de personnes, il s’appuie sur les chiffres fournis par le site encyclopédique Noosfere, mais aussi la base en ligne BDFI et les données de ventes de l’institut GFK, en plus d’éplucher la presse généraliste. L’Observatoire a également réalisé en 2021 un vaste sondage portant sur le lectorat des genres de l’imaginaire et a produit une carte de l’imaginaire en France1.

Des chiffres, c’est bien, mais qu’ont-ils apporté ? Eh bien quelques surprises malgré tout : saviez-vous que le nombre de parutions tourne autour de 1400 titres par an (romans adultes), dont 800 inédits (plus quelques dizaines d’essais), qu’il se produit plus de science-fiction que de fantasy et que 55 à 60 % de la production est francophone ? On n’aurait guère pensé non plus que le chiffre d’affaires global du milieu, après une légère diminution, a globalement augmenté depuis 2016, passant de 50 millions à près de 60 millions pour 2021 et 2022. On retrouve là néanmoins l’effet positif du confinement, les années à venir devraient marquer un recul.

En terme de parité, le nombre de titres écrits par des femmes est en constante augmentation et serait majoritaire depuis 20202. Une grande différence intervient depuis cette même année 2020 dans l’attribution des prix (effet post-#metoo ?), avec des chiffres beaucoup plus proches de la parité alors qu’ils évoluaient entre 20 et 35 % jusque-là. En termes de présence dans les médias, globalement, les genres de l’imaginaire représentent 4 % des articles produits, avec qui plus est une récurrence des mêmes titres locomotives (on citera Les Furtifs de Damasio ou L’Anomalie, le prix Goncourt d’Hervé Le Tellier). Plus inquiétant, même si c’est loin d’être une surprise, il y a une prédominance (plus de 75 %) d’articles pour des titres sortis chez des éditeurs généralistes. Peut mieux faire, donc.

Des bonnes nouvelles ? Sur cinq ans, on observe 8 nouveaux festivals en France, 22 nouveaux éditeurs (contre 16 disparus), 10 nouvelles collections spécialisées (3 arrêtées). De quoi se rassurer (un peu) sur l’intérêt et le dynamisme de la scène imaginaire…

Vincent Gerber

1 À retrouver sur la page « Liens » de notre site.

2 Dans les trois genres de l’imaginaire confondus. Si on compare par genre, les hommes écrivent majoritairement de la SF, les femmes beaucoup plus de fantastique, parité en fantasy selon BDFI.

Coup de projecteur sur la SF australienne

Quand on pense à l’Australie, ce sont les plages de sable blanc, l’outback, les araignées et les requins géants qui nous viennent d’abord en tête. En mode cinéma SFFF, on pensera évidemment à Mad Max. Les plus experts se souviendront également que Matrix et les épisodes II & III de Star Wars y ont été réalisés.

Mais l’Australie est également un terreau fertile pour les auteurs de science-fiction. Si les paysages uniques ont leur importance dans les œuvres produites, l’histoire politique du continent a également joué un rôle majeur. Le rapport complexe du pays à la colonisation et aux premiers peuples – les aborigènes et insulaires du détroit de Torres – ainsi que l’influence de politiques comme la « White Australia Policy », un ensemble de lois et de politiques raciales mises en place pour limiter l’immigration non-européenne en Australie, aura généré son lot de récits teintés par le racisme et la xénophobie, mais également explorant l’altérité.

L’interdiction des pulps en Australie dans les années 1930 a eu un rôle paradoxalement positif dans le développement de la science-fiction australienne. Selon le ministre des douanes de l’époque : « Certaines publications importées en Australie n’ont aucune valeur littéraire ou intellectuelle et sont manifestement publiées pour satisfaire ceux qui cherchent à assouvir des goûts pervertis pour la morbidité, le sadisme, la sensualité, etc. ».

Les romans de pulp fictions, les bandes dessinées, les magazines et le matériel pornographique étaient ainsi considérés comme une menace, non seulement pour la morale et la culture, mais aussi pour les normes littéraires de l’Australie. La Seconde Guerre mondiale a également participé à limiter l’accès aux récits importés, qui n’ont réellement accédé au marché que vers la fin des années 1950 pour cause de léthargie gouvernementale. Cette situation pourtant limitative a eu pour effet d’encourager les écrivains locaux à développer un genre propre, influencé par leur culture et leurs expériences, permettant à la science-fiction australienne de se forger une identité distincte et de contribuer de manière significative à la littérature de genre à l’échelle internationale.

Aujourd’hui, plusieurs auteurs australiens se distinguent :

Greg Egan – Mathématicien sorti de l’Université d’Australie-Occidentale à Perth, athée et végétarien, l’homme est discret. Il est connu pour ses écrits de hard SF, notamment son recueil de nouvelles Axiomatique et ses romans Permutation City et Diaspora, qui explorent notamment les frontières de la réalité virtuelle et de la singularité technologique.

Sean Williams – Auteur prolifique vivant à Adélaïde et encensé par le New York Times – plus de 120 nouvelles publiées et cinquante romans ! – ses récits mêlent space opera et technologies futuristes. Ses œuvres primées incluent The Resurrected Man et Metal Fatigue. On lui doit les séries Evergence, Orphans, Geodesica, Astropolis, Twinmaker et New Jedi Order.

Claire G. Coleman – Coleman a fait sensation dans le paysage littéraire en 2017 avec son premier roman, plusieurs fois primé, Terra Nullius. Descendante du peuple Wirlomin-Noongar, Coleman examine les questions du colonialisme – un thème particulièrement sensible en Australie – à travers ses mondes de science-fiction soigneusement construits.

Amie Kaufman – Originaire de Melbourne, son premier roman, These Broken Stars, a été reconnu comme l’un des meilleurs livres de SF pour jeunes adultes. Elle a également co-écrit la trilogie Starbound avec Megan Spooner et a collaboré avec des auteurs de renom tels que Jay Kristoff pour la trilogie The Illuminae Files et la duologie Unearthed.

Kenneth Bedford – Établi à Fremantle, Bedford est surtout connu pour son humour et ses intrigues mystérieuses. Time Machines Repaired While U-Wait est son roman le plus vendu, et il a également remporté le prix Aurealis du Meilleur Roman de Science-Fiction pour Orbital Burn ainsi que pour Hydrogen Steel.

Moins réputée que ses homologues américaines ou britanniques, la SF australienne gagne à être connue, véritable laboratoire d’une littérature cherchant à faire bouger les lignes dans des domaines aussi importants que la colonisation, la place des peuples premiers, le racisme ou encore la géopolitique d’une île au caractère parfois martien. Sorti en 2022, This All Come Back Now est d’ailleurs la première anthologie jamais réalisée de fiction spéculative aborigène et des îles du détroit de Torres. L’ouvrage a été décrit comme « un acte radical de subversion et de souveraineté intellectuelle en transformant un genre qui a défini les attitudes occidentales envers la race, le colonialisme et la technologie en un véhicule de continuité, de résilience et de résistance des Premières Nations. »

De la SF comme on l’aime ! Pour en savoir plus, rien de tel que de parcourir la base de données de science- fiction australienne : sfadb.com/Aurealis_Awards_Winners_By_Year

Par Tristan Piguet, notre envoyé spécial en Australie

Nouvelle exposition

Une affiche forte, pleine de couleurs pour une nouvelle exposition qui ne l’est pas moins ! De nouveaux horizons issus des mondes imaginaires, à découvrir dès le 15 février.

Soirée des auteurs et autrices suisses 2024

Dimanche 8 décembre, les Amis de la Maison d’Ailleurs vous invitent à leur traditionnelle soirée rassemblant les auteurs et autrices suisses de SF ayant publié dans l’année. Liste des papables à retrouver sur l’Almanach. Vous êtes invités à venir les écouter parler de leurs œuvres et échanger avec eux autour de leurs imaginaires.

Rendez-vous dans l’Espace Jules Verne de la Maison d’Ailleurs à partir de 17h. Les présentations des ouvrages sera suivie d’un apéritif.

Entrée libre, ouvert à toutes et à tous.

Vernissage Angle Mort et L’Imaginaire au pouvoir

Double vernissage prévu le vendredi 8 novembre à la Maison d’Ailleurs ! Jean-Luc d’Asciano, directeur des éditions L’Oeil d’Or, sera en débat avec Vincent Gerber, président des Amis de la Maison d’Ailleurs, qui vient de publier L’imaginaire au pouvoir (éd. Passager clandestin). La discussion sera animée par Frédéric Jaccaud, nouveau directeur de la Maison d’Ailleurs.

Vendredi 8 novembre, à 18h30, à l’Espace Jules Verne de la Maison d’Ailleurs.

Entrée gratuite, accès par les escaliers du restaurant du Château, depuis la place Pestalozzi. La présentation sera suivie d’un apéritif.

Enseigne lumineuse martienne à Genève

Le touriste martien qui se baladerait à Plainpalais serait surpris de pouvoir lire une enseigne dans sa langue sur l’immeuble du 20, avenue Henri-Dunant. Mais de quels Martiens parle-t-on : ceux d’Herbert George Wells, de Ray Bradbury, d’Edgar Rice Burroughs…? Non, ce sont ceux d’une Genevoise qui se serait rendue sur place, en pensée, et qui aurait appris à parler et écrire le martien ! Rembobinons…

Fin 1899, Théodore Flournoy, professeur de psychologie à l’Université de Genève, publie Des Indes à la planète Mars, qui deviendra un best-seller traduit en plusieurs langues1. Ce livre décrit les expériences de spiritisme menées avec une médium genevoise, Catherine Müller (1861-1929), qui prétend avoir des visions de la planète Mars. Afin de protéger sa vie privée, Flournoy lui donne le pseudonyme d’Hélène Smith. Dans son état somnambulique, Hélène Smith dessine des paysages et habitants martiens, et écrit des textes en martien qui sont reproduits dans Des Indes à la planète Mars.

Revenons maintenant au XXIe siècle. En 2006, les Fonds d’art contemporain du Canton et de la Ville de Genève lancent le projet d’art public « Neon Parallax » visant à poser des installations lumineuses sur les immeubles de la plaine de Plainpalais, en contrepoint artistique aux publicités. Inaugurée le 27 juin 2022, l’installation de l’artiste allemand Olaf Nicolai « ALDEZBF ? Imagination sublime », est basée sur l’écriture martienne d’Hélène Smith.

Bruno Mancusi

Légende photos : L’immeuble du 20, avenue Henri-Dunant et son enseigne en caractères « martiens » (photo © Bruno Mancusi).

1 Dernière édition française : L’Harmattan, 2006.

Sébastien Perroud, dit PET : portrait

Né en 1969 à Vevey, PET, aujourd’hui surnommé le Corridor Cosmique, se passionne dès son plus jeune âge pour le dessin. Après sa scolarité, il s’oriente vers un apprentissage de décorateur-étalagiste, métier qui lui permet de faire vivre ses idées aux yeux de tous. Mais il n’en reste pas à cette vitrine, ce monde figé par l’attente des grandes enseignes, et décide, en 1992-1993, de participer à un concours de jeunes talents lors de feu le festival BD de Sierre où il obtient le cinquième prix avec ses planches. Cette consécration l’incitant à persévérer, il réalise alors sa première BD de 82 pages avec Renaud Mignot, œuvre qui ne sera jamais éditée.

En 1999, il rencontre Dominique Willemin avec lequel il collabore sur l’album J’ai épousé une communiste qui sort aux éditions Paquet en 2003, et sera réédité en noir/blanc en 2010 avec la sortie du tome 2.

Il enchaîne et publie en 2004 « Le Botaniste », une commémoration du Jardin botanique de Genève, toujours aux éditions Paquet.

Entre 2008 et 2013, sous le nom du Corridor Cosmique, il publie pour le journal 24Heures des dessins sous la rubrique « Esprit des lieux ». Des endroits dans le canton de Vaud choisis par le quotidien qu’il fait vivre grâce à son talent. C’est là que naît vraisemblablement son choix de devenir postier, métier qu’il exerce aujourd’hui encore à 60%.

2017, c’est l’année où il publie chez Hélice Hélas une bande dessinée pédagogique, « Yoko-ni », écrite par Christian Denisart et Eugène, qui fut à l’origine une pièce de théâtre. Ce sera la dernière BD de Sébastien Perroud : après celle-ci, il ne se consacrera plus qu’aux montages mêlant photographies et figures dessinées, technique développée durant des années pour notre plus grand plaisir.

Interview

À Mont-la-Ville, dans sa maison juchée au pied des massifs du Jura, dans une ambiance sereine, nous retrouvons PET, le Corridor Cosmique, devant une bière locale ambrée.

Pourquoi PET, et ensuite le Corridor Cosmique ?

(Rires). PET c’est la signature de bande dessinée, un surnom d’amis et d’enfance surtout, mais qui, au fil du temps, est associée à une signature de dessins humoristiques. Le Corridor Cosmique c’est un concept plutôt qu’une signature.

Comment t’est venue l’idée d’associer photographie et dessin ?

Depuis tout jeune j’aime dessiner. Des lignes claires des bandes dessinées de mon enfance, je suis passé aux ombres, aux clairs-obscurs, traits que j’ai pu affiner pour la BD. Au fil du temps, j’y ai associé la photographie, un art que j’affectionne particulièrement et que j’exerce en amateur. L’idée d’associer les deux a toujours été omniprésente dans mon travail, mais elle est finalement née avec un concours international sur Internet, Talent House « Dessine sur tes photos ». J’y avais présenté 5 planches et comme j’avais été bien placé, ça a été le déclic. C’était pour moi une autre approche des images et ça me permettait d’intégrer mes planches de dessins.

Carte 2024 – Corridor Cosmique

Comment te vient l’idée de l’œuvre ? Est-ce d’abord la photographie ou l’idée du personnage ?

Je fais beaucoup de photos et de dessins en vrac, j’essaie de les intégrer les unes aux autres. À force de tentatives, je suis parfois surpris. C’est un peu une exploration. Je dessine au crayon sur papier, mais applique la couleur avec Photoshop. J’ai utilisé la technique de la couleur directe pour la bande dessinée et l’illustration, c’est-à-dire pinceaux et peinture sur papier, jusqu’en 2008.

Quel est le temps consacré à une illustration ?

Chacune me prend environ 2 jours de travail. Retravailler l’image, créer le personnage en dessin. Ma volonté est de rester sur un côté minimaliste sur chaque œuvre avec un, voire deux, personnages sur une photographie. Il s’agit de jouer avec les perspectives, les ombres projetées, c’est le travail le plus long à réaliser : la finalisation.

Quelles sont tes références en matière de bande dessinée ?

Bien sûr j’ai commencé par lire les bandes dessinées classiques, Spirou, Tintin, etc. Mais avec le temps, je suis devenu plus exigeant et critique envers les dessins. J’ai été très intéressé par le travail d’Enki Bilal et de Moebius, où chacune de leur case peut être considérée comme un tableau à part entière. C’est surtout l’œuvre d’Enki Bilal que je trouve la plus fascinante. Celle parfois délirante de Boucq m’impressionne aussi.

Et en matière de SF ?

J’aime beaucoup la SF mais ai rarement été surpris ou vraiment conquis par les histoires. J’aime beaucoup les représentations, les décors, la photographie et, si je dois donner une référence, c’est le Blade Runner de Ridley Scott. Il y a évidemment aussi Steven Spielberg ou John Landis qui ont leur propre univers représentatif. Dans la SF, il y a beaucoup de choses que je trouve moyennes. On mise surtout sur le visuel au détriment de l’intrigue comme dans Star Wars par exemple. Enfin, c’est mon avis.

Comment qualifies-tu tes œuvres ?

Certains peuvent y voir de la SF. En ce qui me concerne, j’associe plus facilement mes œuvres au monde fantastique. La thématique est toujours orientée vers des paysages du quotidien auxquels j’intègre des éléments fantastiques.

Pour la carte de membre 2024, qu’est-ce qui t’a incité à changer les codes d’une vue de face de la Maison d’Ailleurs ?

Principalement une question technique. Après y être retourné plusieurs fois, je me suis rendu compte que la lumière n’était pas bonne, du moins, je n’étais pas satisfait par l’éclairage sur la façade principale. Du coup, je me suis placé dans la rue adjacente et, après plusieurs tentatives, la lumière sur la tour du château me paraissait meilleure. C’est comme ça qu’est née l’idée. Purement un point de vue technique.

Et comment conjugues-tu ton activité avec celle de facteur ?

C’est justement mon travail de postier à 60% qui me permet de dégager du temps pour poursuivre mes activités créatrices.

Que penses-tu de l’émergence des IA dans le domaine de l’illustration ?

Je trouve le rendu magnifique, je voulais même collecter des images comme sources d’inspiration. Et puis je me suis rendu compte que parfois ceux qui exécutaient les images n’avaient pas nécessairement de connaissances dans les disciplines d’illustrateur ou de dessinateur. Je regrette qu’on retrouve souvent des images trop parfaites, trop lisses, sans la texture, la « patte » de l’artiste.

Pour tout savoir sur Corridor Cosmique : www.corridor-cosmique.ch

Kurt